Bilan HRP 2012


Bilan de cette (trop courte) expérience

Challenge :

L’idée de départ était de faire la HRP d’une traite, de Hendaye à Banyuls, sans assistance, et en ne dépassant pas trente jours pour les 41 étapes théoriques, cette permission nous ayant été accordée du bout des lèvres par nos moitiés respectives.

Poids :

Au début de la préparation, on avait espéré finaliser les sacs entre 12 et 15 kilos. Mais, à force d’en rajouter, en voulant avoir plusieurs jours d’autonomie en bouffe, on a fini à 2 x 22 + 4, comprenant les réserves d’eau à toc.

Des questions se posent : est-ce qu’avec un sac moins lourd, en prenant plus de risque pour les ravitaillements, on aurait encore amélioré notre vitesse de progression, déjà assez élevée au début ? Le gain de poids aurait-il été annulé en terme de progression par l’obligation de crochets vers des points de ravito, qu’on a pu ainsi shunter ?

Autonomie :

L’autonomie, procurée par la tente et la grosse quantité de nourriture embarquée, avait pour but de faciliter une progression indépendante des départs/arrivées dans des villages ou des refuges gardés.

Le chargeur solaire, qu’on a eu l’occasion d’utiliser seulement les deux premiers jours a bien rempli son office et nous a permis de recharger téléphone, montre GPS et appareil photo. Après, ils ont enlevé le soleil…

Météo :

Après les deux premiers jours sous le soleil, à transpirer et boire comme des sacs, on a progressé les trois jours suivants dans un épais brouillard, avec une pluie omniprésente et de longs épisodes venteux. Les prévisions prises aux chalets d’Iraty, auprès d’anciens, donnent une idée de l’ampleur du phénomène : « De toute façon, ça peut pas être pire… ».

À partir de la troisième nuit, le vent plaquait la pluie sur les parois de la tente, l’eau entrait par capillarité, les duvets étaient partiellement trempés. Pas grand-chose à faire pour éviter ce phénomène, si ce n’est le choix le plus judicieux possible de l’emplacement. Pas de séchage possible avec la météo pourrie au matin, aïe aïe aïe… Les deux nuits suivantes, en dur, furent moins pénibles.

Le jour du Grand Renoncement, le soleil a percé les nuages en fin de matinée, comme pour nous narguer, au moment où nous étions pris en charge sur la piste par un premier véhicule, après avoir quitté l’abri d’Ardané. Un épisode de beau devait s’installer pour deux jours, avant que ça ne rebascule dans la tourmente.

Ju nous avait prévenus : « C’est une année des treize lunes… »

Progression :

On s’attendait, sur certaines étapes, à perdre un peu de temps en raison des orages qui nous auraient bloqués, et sur d’autres à être ralentis par les passages de névés. Par contre, on comptait sur certaines autres étapes, données en 5 ou 6 heures, sans grosses difficultés pour nous permettre de « gratter » des jours.

Ça avait bien commencé, on tenait le cahier des charges : un peu plus qu’une étape par jour, pour boucler en 1 mois. Puis, les ampoules, installées dès le premier jour, sont parties en vrille…

Ampoules :

La gestion des ampoules a été sous-estimée dans la confection de notre trousse à pharmacie, pourtant déjà conséquente. Il nous aura manqué une seringue pour injecter de l’éosine, de la double peau, et des petits ciseaux pour nettoyer proprement les peaux mortes, sûrement plus efficaces qu’un vieil Opinel. La prise en charge des premiers soins a été également traitée à la légère. On ne gère pas au long cours, dans un environnement perpétuellement humide, ce genre de petits bobos de la même façon que pendant une rando ou un raid de deux jours.

Les ampoules mouillées ont macéré pendant des journées de 8 à 12 heures de marche/pauses. Le pied vrillait sur les appuis incertains en terrain accidenté, principalement en descente, déchirant les chairs abimées, malgré le soutien apporté par les bâtons. Tout cela a contribué à ralentir la vitesse et augmenter le temps de progression, d’une à deux heures par jour. À cela commençaient, à partir du cinquième jour, à s’ajouter des début de tendinites sur les tendons d’Achille, en raison d’une pose anormale des pieds afin de limiter la douleur due aux ampoules. Le risque d’infection était non négligeable, en raison des différentes déjections animales piétinées.

Une solution au problème des ampoules aurait été de faire un break de trois jours dans un endroit relativement sec (l’abri d’Ardané par exemple) afin de laisser cicatriser tout ça et repartir dans de bonnes conditions. Mais ce n’était pas compatible avec notre contrainte de boucler la traversée en moins de trente jours.

Régime :

Radical ! Au bout de cinq jours de cet exercice, sans avoir le sentiment de s’être privé de nourriture, on a perdu entre deux et trois kilos, principalement issus d’un dégonflage de bouée. Ceci étant confirmé par les resserrages quotidiens de ceinture au petit matin. Donc, un régime à conseiller à ceux ou celles qui ont déjà tout essayé.

Ambiance :

Jamais les difficultés n’ont entamé notre bonne humeur. Dans l’équipe, il y avait un taiseux et un bavard, mais comme le bavard était concentré à mort sur l’orient’, et le taiseux sur la façon dont il posait les pieds sur les cailloux, il se passait parfois une heure avant que quelques mots soient prononcés, et plus pratiques que philosophiques, genre : « On remet les polaires ? » ou « C’est koa l’altitude ? »…

Matos :

Grace à différents copains qui ont, une nouvelle fois, complété l’équipement de l’expé, on  a pu partir dans de bonnes conditions. Qu’ils soient remerciés pour leur contribution. Tomate pour son sac de 50l, Bewa pour une veste, Titi pour un sac 60 +10, une veste, un duvet, Magic pour un réchaud, des bâtons, une montre Suunto, Cécile pour un GPS, Yannick pour le topo, Philinox pour la carte de Berlin Ouest…

Chaussures :

Le choix de partir avec des gore-tex a été tranché de façon catégorique par les techniciens de l’assoce : « Nan, ça empêche l’eau de ressortir ». Alors va pour des Trabuco non gore-tex pour Oliv, étrennées en compagnie de Titi Cuistot sur l’O’bivwouac, un mois plus tôt. De plus, les ongles tombés à cette occasion n’étant pas repoussés, ils ne risquaient pas de poser problème pendant la HRP.

Kikos, pour sa part, avait opté pour des Salomon Gore-tex et il semble qu’il ait moins baigné dans le jus….

Reporter :

Quel dommage que nous n’ayons pas pu aller jusqu’au bout, ou du moins continuer le périple quelques jours de plus, en regard de la qualité des reportages quotidiens effectués par le gars Hugues, à partir de la prise de notes de Flo, notre interlocutrice téléphonique. Ce garçon a des talents littéraires incontestables et il est vraiment dommage qu’il bascule de nouveau dans la délinquance, privé de cet exercice rédactionnel…

Regrets :

Regret de ne pas avoir découvert des endroits dont les noms nous avaient fait rêver pendant la préparation des cartes et des itinéraires : la Table des Trois Rois, le Cirque d’Ansabère, Gavarnie, Le pic d’Anie, la Rencluse, l’Ull de Ter… et bien sûr la dernière étape avec la Méditerranée en point de mire.

Regrets d’avoir évolué dans un couloir imposé par le brouillard, sans profiter du panorama, lorsque nous commencions à prendre de l’altitude, à 2000 mètres.

Regret de lâcher l’affaire au bout de six jours, d’autant plus que la carte générale retraçant le chemin parcouru montrait que c’était bien entamé et que l’objectif initial semblait tenable sans cette histoire d’ampoules.

Frustration :

La décision de stopper l’avent’hure s’est imposée d’elle-même, incontournable. Elle n’était pas le fruit d’une longue réflexion, à peser le pour et le contre, mais comme la seule issue possible au chemin de croix quotidien. Elle n’a donc pas été difficile à prendre, mais sera sûrement un peu dure à digérer.

Prolongements :

Si on veut positiver, cet échec peut éventuellement servir de répétition ou de test matos en condition réelle pour préparer une réussite future…

Quelle suite à donner ? Retenter une traversée complète ? Ou bien repartir une prochaine fois du refuge d’Ardané pour un challenge forcément un peu moins exaltant. Ou alors ranger ce projet dans le tiroir des illusions perdues ?

L’avenir nous le dira…

Bonus track : retour en stop

Le retour en stop, sympathique aventure humaine avec de belles rencontres, n’a pas été de tout repos pour les pieds. D’abord, après avoir quitté l’abri d’Ardané, six kilomètres de pistes à claudiquer pendant près de 2 heures. Vers 11 h 30, une première voiture, conduite par un berger d’au moins 70 ans, encore alerte, nous descend à Arrau. Là, deux itinéraires se présentent : par Tardets ou par Saint-Jean-Pied-de-Port (les pieds de porc, on sait qui les avait).

On tente des deux côtés et, au bout d’un long moment, c’est sur la première option qu’une seconde voiture nous embarque, dans laquelle un père Béarnais et un de ses fils font l’assistance d’un autre fils qui s’entraîne en vélo de route pour une prochaine compèt locale à travers les cols entre la France et l’Espagne.

Ce duo nous dépose à Aramits, où nous embarquons destination Oloron avec un jeune naturaliste, habitué à arpenter la pampa armé d’une carte IGN et d’un filet à papillons, pour le compte de Natura 2000.

A peine 30 secondes après avoir été déposés, une active mamie préretraitée de 61 ans, avec plein de projets, nous prend en charge, malgré une ancienne expérience malheureuse de dépannage d’autostoppeur. Elle a un train à prendre, mais consacre du temps pour nous emmener à un endroit qu’elle pense stratégique.

Déposé au centre de Pau, au début de la route de Bordeaux, on fouille les poubelles à la recherche de cartons pour faire nos pancartes d’invite. Ça ne prend pas, si près du centre , alors il faut marcher avec ces putain d’ampoules pendant plusieurs kilomètres pour viser la sortie de ville. À une station service, un jeune commercial habitant Annecy et pratiquant le parapente, qui se rend à l’aéroport afin de prendre l’avion, nous charge dans sa voiture de location pour nous benner sur le périf.

Là, on tente notre chance sur la nationale, mais ça queute, alors on se transfère 90° Ouest pour viser un transport vers l’entrée d’autoroute à Lescar. Au bout d’un moment, c’est une jeune femme avec moult piercings et tatouages qui se charge de ces quelques kilomètres.

L’entrée d’autoroute dessert trois destinations : Toulouse, Bayonne et Bordeaux, cette dernière étant très peu utilisée, en raison d’un prix de péage prohibitif. On se relaie pendant une heure sur l’îlot qui sépare les deux voies d’accès afin d’interpeller les automobilistes avec notre pancarte. Au moment où on veut changer notre fusil d’épaule, en remplaçant la pancarte « Bordeaux » par une pancarte « Bayonne », une voiture immatriculée 33 s’arrête enfin. C’est donc une jeune kiné espagnole, de retour de Valence, contente d’avoir des compagnons de voyage à qui parler au bout de 700 km de route, qui nous achemine à deux entrées de la grande ciudad girondine.

Un jeune père de famille, très roots, avec un bébé à l’arrière dans une berline un peu fatiguée nous emmène sur quelques kilomètres, à 170 km/h jusqu’à la prochaine station service.

Là, on tente notre chance de-ci de-là, en gardant un œil sur une Golf immatriculée 44 qui attend sur une place de parking. Dès que la conductrice apparaît, elle est fortement sollicitée pour nous permettre d’effectuer la fin de l’étape. Elle semble réticente, n’ayant jamais pris d’auto-stoppeurs de sa vie, mais on arrive à être convainquant, lui faisant valoir que c’est pas obligé que ça se termine par un drame. Un peu sur la réserve au début, elle semble finalement apprécier d’avoir des humanoïdes dans son véhicule pour couper la monotonie de son voyage. C’est une élégante quinqua, travaillant dans une collectivité territoriale de Vendée, qui se tape l’aller-retour Nantes/Toulouse dans la journée, pour une réunion de travail. Elle nous dépose finalement vers 22h au péage sur lequel tout avait commencé, il y a quelques jours seulement, mais qui paraissent une éternité, tant ces journées furent bien remplies…

16 Réponses

  1. yo les pepere ….. plein de pener pour vos pieds ….
    maintenant …. vous faite quoi.??

  2. Moi ,je pense que vous Z’êtes fin prêts pour Pekin Express = vous êtes trop forts en STOP !!!…la HRP se sera pour une autre fois

    • Pekin Express, ouaillenote ? On laisse la Ferme Célébrités à Ju, la Carte au Trésor à Magic, Secret Story à LKT, L’amour est dans le Pré à Perrine, Un Dîner Presque Parfait à Vaness, Super Nanny à Marie, D&Co à Titi et l’île de la Tentation à Lolo…

  3. Prenez surtout cette expérience comme une victoire, moi je suis admiratif, maintenant vous savez ce qu’il faut modifier et la météo ne sera pas toujours aussi pourrie….
    Vos moitiés peuvent être fières de vous et en plus elles ont de la chance, elles vous récupèrent plus tôt que prévu…

    A Bientôt,
    Gill

  4. Je suis tout aussi admiratif que Gill. Bravo !!! Je m’étais caler mes rendez-vous quotidiens sur le site Flying pour vivre avec vous (mais par procuration) cette avent’hure, et je suis déçu pour vous, mais je ne doute pas du renouvellement de l’expérience. Cette « répétition générale », qui plus est dans des conditions pourries, est le point de départ du périple transpyrénéen qui ira au bout.
    Deus choses m’intriguent :Oliv, as tu vraiment essayé de soigner tes ampoules avec un Opinel ? Et grace à la carte prétée par Phiklinox, avez vous facilement franchi Check Point Charly entre la France et l’Espagne ?

    • Réponse 1 : bah voui, j’avais pô de fourchette …
      Réponse 2 : sa carte, on ne s’en était pas encore servi ; je l’avais mise de côté pour quand on serait arrivé à l’Ull de Ter ; j’la sentais bien pour cet endroit…

  5. Excellent…comme d’hab !

  6. J’avais commencé à vous suivre depuis Barcarès, et pensais vous croiser à notre retour d’Espagne vers Puigcerda ;o). En me reconnectant, je vois que vous n’êtes pas allés au bout…
    Pour Oliv, je compatis, j’ai morflé pour la transaq et le marathon des sables avec des ampoules multiples, mais, moi, ce n’était « que » 6 jours, j’ai donc pu tenir…. mais, p…n, ça fait mal….

  7. putain moi qui m’était installer un énorme tas de bois au monte Cinto a 2706mpour vous faire comme les apaches dans fort (Alamo) des beaux anticulaire pour aclamer votre arrivée.Jelesgardes pour une prochaine fois ou je me fais griller des pieds de cochons a ta mémoire!!!!
    y a un truck de trailleur pour faire de la corne avant course le jus de citron et aussi certain comme Seb Chaigneau utilise une pommade qui et pour les coussinets des chiens c’est radicale!!!!!!!
    a bientot vous nous avez fais réver tout de même
    titi le cuisto

  8. Bravo à tous les 2, et sus aux 13 lunes ! (pas bon le 13 en ce mois de juillet, nous on s’est fait voler nos 2 VTT vendredi 13…).
    Je confirme pour les ampoules : TANOPAT (vendu en pharmacie, avant on achetait le produit pour chien, maintenant il existe pour les humanoïdes !). Traitement 1 mois avant, puis crème NOCK 1 semaine avant. T’auras juste les pieds un peu jaunes, mais ça fera moins pieds de cochon !
    A bientôt, et bon été (il arrive, le soleil !)

    • Et pour la bouffe, tu sais où on peut acheter du Pal ou du Frolic lyophilisé ?

      • Pas encore testé ! Mais pour ça, je te fais confiance !
        J’espère que tu vas mieux et que tu peux rentrer tes pieds dans les chaussures…tout ces récits, on se fait du soucis pour toi.

  9. ça évolue plutôt bien
    y’a plus qu’une profonde crevasse en voie de cicatrisation
    la douleur a bien diminué
    je vais bientôt pouvoir y retourner…

  10. Fabulous!
    Oliv, je t’envie vraiment. Partager ça avec son fiston, c’est formidable. Vous êtes formidables…
    Continue de me faire rêver avec tes aventures
    A très bientôt
    Amitiés à Lydie et à toi
    Conscrit INOX

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